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Le blog du G. P. S.

Le blog du G. P. S.

Depuis décembre 2008 à Toulouse, le GPS (Groupement Pour la défense du travail Social) se bat contre les atteintes portées aux personnes accompagnées du secteur social. Pour ce faire de multiples actions ont été menées en faveur du droit de ces personnes.


"Sans-papiers : syndicats et associations se mettent en ordre de bataille"

Publié par Le blog du G. P. S. sur 29 Septembre 2012, 06:00am

Catégories : #Archives partout 2012

Article de Carine Fouteau paru sur Médiapart le 25 septembre 2012 :

 

"Il démantèle les campements de Roms, se rétracte sur le droit de vote des étrangers et enterre le récépissé pour éviter les contrôles au faciès. Quel sort Manuel Valls, le ministre de l’intérieur, va-t-il réserver au dossier suivant, la régularisation des étrangers en situation irrégulière ?

Pour l’heure, c’est le calme avant la tempête. Les interlocuteurs se jaugent avant une rencontre «dans les jours qui viennent», selon le ministère, et l’envoi d’une circulaire cosignée avec Michel Sapin, le ministre du travail, d’abord prévue pour septembre, désormais annoncée pour octobre. Au mieux. Promesse électorale de François Hollande, ce texte doit établir des critères nationaux « précis, objectifs, compréhensibles » afin de « mettre fin à l’arbitraire » des préfets et faire ainsi office de nouvelle bible en la matière. Le sort de dizaines, voire de centaines de milliers d’étrangers sans titre de séjour – leur nombre est évalué en France entre 200 000 et 400 000 – en dépend.

Pour affûter leurs arguments, douze organisations syndicales et associations se sont réunies mardi 25 septembre 2012 dans la soirée (lire leur note d'intention). Avec des collectifs de sans-papiers, elles ont rappelé, lors d’une manifestation organisée devant l’église Saint-Bernard, à Paris, samedi 1er septembre, que leur principale revendication est la régularisation de tous ceux « qui travaillent d’une façon ou d’une autre ».


Lors de l'occupation de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration en octobre 2010. 
Lors de l'occupation de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration en octobre 2010.

Depuis l’arrêt de l’immigration professionnelle en 1974, les gouvernements de droite comme de gauche ont contourné à tour de rôle cette décision prise à la suite du premier choc pétrolier et de la crise économique qui s'ensuivit. Environ 80 000 personnes ont bénéficié de la circulaire Chevènement de 1997, même si presque autant ont été déboutées. Au total, sous Lionel Jospin, 150 000 étrangers ont obtenu la normalisation de leur situation. Au cours du quinquennat de Nicolas Sarkozy, les estimations extrapolées à partir de statistiques officielles (à la page 72 du rapport sur les Orientations de la politique de l'immigration et de l'intégration) aboutissent à des résultats identiques, voire supérieurs, malgré des discours extrêmement restrictifs et la légitimation de la pratique du “cas par cas”.


Fondée sur le pouvoir discrétionnaire des préfets, cette politique par à-coups a été contestée à partir de 2006 et surtout 2008 par les travailleurs sans papiers eux-mêmes. Une mobilisation d’un nouveau type a vu le jour, avec des occupations de restaurants et d’entreprises à répétition, des manifestations, des sit-in, etc. À chaque fois, il s’est agi pour les étrangers employés de s’affirmer avant tout comme salariés ayant des droits et de se rendre visibles à la société française. Ils ont commencé à être audibles médiatiquement lorsqu’ils sont parvenus à faire comprendre qu’eux aussi déclaraient leurs revenus et payaient des impôts dès que leur patron leur en laissait la possibilité.


« François Hollande et Jean-Marc Ayrault ne peuvent pas faire moins que leurs prédécesseurs »


Lors de la campagne électorale, François Hollande a exclu toute régularisation générale mais la “plate-forme des 12”, qui regroupe entre autres la CGT, la FSU, Autremonde, la Cimade, Femmes égalité, la LDH et RESF, est déterminée à faire sortir massivement de la clandestinité ceux qui travaillent, quelle que soit leur situation dans l’emploi.


« François Hollande et Jean-Marc Ayrault ne peuvent quand même pas faire moins que leurs prédécesseurs ! » s’exclame Francine Blanche, membre de la direction confédérale de la CGT, responsable des droits sociaux et des questions de discrimination, qui rappelle que 6 804 personnes se sont mises en grève depuis 2008. Sous la pression de la mobilisation, un des trois ex-ministres de l’immigration, Éric Besson, a en effet été contraint d’établir des critères âprement discutés avec les organisations syndicales. Ceux-ci ont été mis en œuvre pendant un an, puis la parenthèse a été refermée en juin 2011. « Nous ne partons pas de rien. Une grande partie du boulot a été effectuée. Notre objectif est d’améliorer et de simplifier », insiste-t-elle.


Les principaux critères envisagés par le nouveau gouvernement sont connus, mais restent à affiner. Parmi eux et sans qu’on sache à quel point ils sont cumulatifs : résider depuis au moins cinq années sur le territoire, disposer d’une promesse d’embauche et avoir des attaches familiales ou des enfants scolarisés.


À l’initiative du mouvement de grève, Raymond Chauveau, chargé des droits des migrants à la CGT, récapitule les risques de désaccords. La durée du séjour d’abord : « Cinq ans de présence en France ? C’est inconcevable. Cela reviendrait à accepter que les sans-papiers soient surexploités pendant cinq ans. Hollande et Ayrault sont-ils prêts à officialiser l’existence d’une forme d’esclavage moderne ? »


La régularité de l’emploi ensuite. Les situations sont différentes selon que les étrangers bénéficient ou non d’un contrat de travail et de feuilles de paie et qu’ils sont déclarés ou non par leur employeur. Les uns ont pu produire des documents falsifiés ou de vrais documents ne leur appartenant pas. Les autres sont employés “au noir”, sans rien, et ne disposent d’aucun filet de sécurité. Dans la plupart des cas, l’entreprise n’ignore pas ce qui se passe. Les “12” ne voudraient pas que les possibilités de régularisation soient réservées aux seuls salariés déclarés. « Tous les travailleurs ont des droits, tous doivent être protégés, a fortiori les plus exploités », estime le syndicaliste.


Autrement dit, en cas d’absence de contrat de travail, de feuilles de paie et de signalisation à l’Urssaf, les sans-papiers ne doivent pas être pénalisés. « Il faut trouver un dispositif qui inverse la responsabilité. Non seulement il faut donner davantage de moyens aux inspecteurs du travail, mais aussi il faut modifier le Code du travail afin qu’un salarié puisse se retourner contre un employeur qui ne respecterait pas la législation, par exemple qui ne le déclarerait pas », indique Raymond Chauveau, qui se félicite de la réunion, prévue le 15 novembre, de la Commission nationale de lutte contre le travail illégal.


« Le laxisme, c'est de laisser se vider les caisses »


En période de crise, le manque à gagner, qui représente 4 % du PIB, soit 60 milliards d’euros par an, n’est pas négligeable, relève-t-il. « Le laxisme, ce n’est pas de régulariser, c’est de laisser les travailleurs sans droits dans des situations d’ultra-flexibilité et de laisser se vider les caisses », lance-t-il en direction de Manuel Valls, convaincu que l’opinion publique est sensible à la cause des travailleurs sans papiers.


Représentante de la FSU, Brigitte Cerf entend elle aussi montrer à ses interlocuteurs gouvernementaux que la rationalité économique et la “bonne” gestion publique sont de son côté : « La situation actuelle n’est tenable pour personne, ni pour les sans-papiers, ni pour les pouvoirs publics. Des pans entiers de l’économie ne peuvent fonctionner sans ces travailleurs, que ce soit dans le bâtiment, la restauration, le nettoyage, les services à la personne. Ils participent à la création de richesses dans notre pays et cela malgré la dureté de leurs conditions de travail. Il faut repartir sur des bases saines et arrêter l’hypocrisie car ne rien faire revient à faire perdurer les trafics en tout genre, tout le monde le sait. »


Étant donné la stratégie droitière adoptée par Manuel Valls depuis sa nomination place Beauvau, les acteurs syndicaux et associatifs apparaissent dubitatifs voire inquiets. Avec insistance, ils ont exigé que la rencontre ait lieu avec des représentants du ministère du travail, en plus des membres du ministère intérieur.


« On ne sait pas trop à quoi s’attendre », avance Brigitte Cerf. « On peut espérer une oreille plus attentive que sous le quinquennat précédent », affirme-t-elle, en référence aux nombreux élus du PS qui, à un moment ou un autre, quand ils étaient dans l’opposition, sont montés au créneau pour défendre des travailleurs sans papiers. Alors qu’il était député-maire d’Évry dans l’Essonne, le ministre de l’intérieur, en 2008, s’est ainsi félicité de la régularisation d’employés de la société Europe Service Propreté, affirmant même dans Le Parisien avoir apporté son soutien aux grévistes « en leur distribuant régulièrement des repas ».


« Toutefois, enchaîne-t-elle, j’ai quelques doutes pour la suite. La politique actuelle menée à l’égard des étrangers ne me paraît pas fondamentalement différente d’avant, les résultats sont similaires. Les préfets laissent entendre qu’ils attendent la circulaire pour modifier leurs pratiques. En attendant, ils n’ont pas levé le pied. »


Les premières déclarations de Manuel Valls sont d’ailleurs ambiguës puisque, dans un entretien au Monde, il a déclaré à la fois que les critères mis en place sous Nicolas Sarkozy avaient « été interprétés de manière beaucoup trop restrictive » et que le nombre de personnes régularisées ne serait pas plus élevé, aux environs de 30 000 par an.


Au fil des années et des luttes, le mouvement des sans-papiers s’est recomposé. Certaines organisations se sont mises en retrait, comme la CFDT, l’Unsa et Solidaires, tandis que d’autres se sont signalées, tel le Collectif du 31 mai contre la circulaire Guéant : les étudiants sont désormais associés aux salariés, les “12” demandant la régularisation de tous les jeunes majeurs scolarisés et l’attribution de cartes pluriannuelles le temps des études ; les familles aussi sont prises en compte, comme en témoigne la présence continue de RESF, dont une délégation doit être bientôt reçue au ministère de l'intérieur. La revendication ne porte, certes, pas sur la régularisation de « tous les sans-papiers », mais, in fine, l’ensemble des cas de figure sont couverts. "

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