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Le blog du G. P. S.

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Depuis décembre 2008 à Toulouse, le GPS (Groupement Pour la défense du travail Social) se bat contre les atteintes portées aux personnes accompagnées du secteur social. Pour ce faire de multiples actions ont été menées en faveur du droit de ces personnes.


Pour le "préfet des Roms", "il faut mettre les Roms dans les mêmes starting-blocks que tous les autres exclus"

Publié par Le blog du G. P. S. sur 29 Septembre 2013, 22:15pm

Catégories : #Archives partout ailleurs 2013

Pour le "préfet des Roms", "il faut mettre les Roms dans les mêmes starting-blocks que tous les autres exclus"

Article paru sur Le Monde.fr | 29.09.2013 à 14h25 • Mis à jour le 29.09.2013 à 17h58 | Propos recueillis par Béatrice Jérôme

 
Des Roms dans un camp à Croix, dans le nord de la France, le 28 septembre.

Délégué interministériel pour l'hébergement et l'accès au logement des sans-abri, le préfet Alain Régnier est chargé de coordonner les actions du gouvernement envers les migrants d'origine bulgare ou roumaine. Il déplore la "difficile" application de la circulaire du 26 août 2012, qui prévoit un accompagnement social des "Roms" expulsés des campements illicites.

Selon le dernier rapport d'Amnesty International, plus de 10 000 personnes ont été expulsées de bidonvilles au premier semestre 2013, contre moins de 12 000 l'an passé. L'accélération des expulsions n'est-elle pas un obstacle à l'application de la circulaire du 26 août 2012 ?

Les évacuations s'accélèrent parce que beaucoup de demandes de démantèlement de campements ont été déposées en 2011 et 2012 et qu'elles ont été tranchées par les tribunaux en 2013. Cette accélération crée, de fait, des difficultés pour le travail d'insertion des migrants. La circulaire du 26 août 2012 dit bien qu'il faut appliquer les décisions de justice. Mais elle préconise aussi des diagnostics sociaux individuels préalables aux évacuations et recommande aux préfets de proposer des solutions de relogement. J'ai obtenu du premier ministre les moyens financiers – 4 millions d'euros – pour réaliser ces diagnostics : trente opérateurs ont été agréés. Deux cent cinquante diagnostics ont été engagés depuis le printemps.

Mais, en fonction des départements, leur réalisation est plus ou moins conforme à la lettre et à l'esprit de la circulaire. Parfois, les opérateurs sont soumis à des pressions des acteurs locaux pour que les diagnostics soient établis en vingt-quatre ou quarante-huit heures. Le nœud est là. Si on se donne le temps de préparer en amont l'évacuation, on a beaucoup plus de chances de dresser un bilan individualisé des personnes, pour repérer celles qui peuvent et souhaitent rester en France, celles qui retourneront dans leur pays d'origine avec lesquelles on essaie de construire un vrai projet de vie. Nous devrions réussir à mieux concilier le temps des élus, de la justice et celui de l'accompagnement des gens.

Quel bilan tirez-vous des "villages d'insertion" mis en place par certains maires ?

Depuis le milieu des années 2000, quelques collectivités ont pensé que pour en finir avec les bidonvilles sur leur territoire elles pouvaient offrir des solutions de logement. Ces "villages d'insertion" ont été assortis de conditions pour les familles accueillies : gardiennage du site, restriction des droits de visite. Ces expériences qui impliquent des coûts élevés pour les communes ne sont pas toutes des modèles à reproduire. Il faut éviter les "cités de transit" et les approches communautaires. En revanche, comme ce qui a été fait à Strasbourg ou à Grenoble, on peut imaginer des structures modulables d'insertion qui soient conçues comme des sas pour au plus quelques mois entre les évacuations et l'intégration. Sachant qu'on ne peut pas remettre tout le monde dans le droit commun tout de suite.

L'Ile-de-France concentre plus de 40 % des personnes vivant dans des campements. Les aider à en sortir est-il plus difficile qu'ailleurs ?

En Ile-de-France, l'application de la circulaire de 2012 est encore plus compliquée du fait du très grand nombre de campements et d'évacuations. Nous disposons de peu de temps pour réaliser les diagnostics préalables aux expulsions. Les solutions de relogement sont plus difficiles à mettre en œuvre, faute de places d'hébergement. La fragmentation de la gouvernance et l'éclatement des compétences entre acteurs locaux est un obstacle à une meilleure coordination géographique et politique des efforts.

La solution consisterait à avoir une vision métropolitaine du dossier, comme c'est le cas à Nantes, à Lyon ou à Toulouse. J'ai proposé au préfet d'Ile-de-France de mettre autour de la table les élus de la métropole et les présidents de département pour trouver des stratégies, notamment en matière de logement. La récente nomination du sous-préfet Jérôme Normand, placé auprès du préfet de région, devrait faciliter la mise en œuvre de cette approche métropolitaine et interministérielle. Je rappelle que dans les années 1970, on avait affecté 15 % de la production de logement en Ile-de-France à l'éradication des bidonvilles.

Quels sont les obstacles à l'insertion des migrants roms ?

Au plan national, les familles roms qui remplissent les conditions pour rester en France doivent pouvoir être éligibles au droit au logement opposable (DALO). Ce qui suppose qu'ils obtiennent des préfets un titre de séjour selon les mêmes critères que les autres ressortissants de l'Union européenne. Ils seraient ainsi soumis aux mêmes conditions que les autres ménages reconnus prioritaires parmi les mal logés. Les Roms doivent pouvoir être dans les mêmes starting-blocks que les autres exclus. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Toute mon action vise à faire en sorte que cette population avant tout victime du mal-logement puisse être traitée selon le droit commun. Car il ne faut surtout pas de traitement ou filière spécifiques pour les Roms, sous peine de renforcer encore la stigmatisation dont ils sont de plus en plus victimes.

 

Béatrice Jérôme
Journaliste au Monde

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